Violence, passions et guerre : cris des hommes, silence des dieux

Marcel BOLLE DE BAL

 

 

UGS : 2006020 Catégorie : Étiquette :

Description

Durant ces semaines d’été caniculaires, j’ai eu la chance de pouvoir me retirer dans mon havre languedocien pour tenter, malgré une galère oculaire, de rédiger un livre – une sorte de « testament philosophique » – qui m’a été commandé et demandé par Luc Pire, livre probablement intitulé « Au-delà de Dieu ? La foi d’un athée lucide et serein ».

Pour me détendre (?) j’écoutais la radio la plus audible et vivante en ces parages : Radio-Monte-Carlo. Que croyez-vous que figurait en première place des infos ? Point l’horrible massacre du Liban, mais bien les prouesses de l’équipe de France, soudain ressuscitée, au Mondial de foot en Allemagne, puis la performance du ressuscité Landis au Tour de France !

Voilà bien une expression de la « violence » inhérente à notre société médiatique, reflet de nos valeurs de citoyens consommateurs aliénés, qui a troublé ma sérénité estivale. Car, dans les deux cas, les humaines passions se sont déchaînées, autour de ces modernes divinités sportives… Et elles m’ont rappelé les analyses que mon ami Dominique Désir, footballeur professionnel, de haut niveau, et moi avions exposées naguère dans un livre dialogué.

Sur l’équipe de France, fière d’être dite « black, blanc, beur », un débat virulent a été orchestré par l’animateur. Pourquoi ? Car des amis plus ou moins racistes lui avaient confié – en écho aux thèses lepénistes – qu’ils ne se reconnaissaient pas dans cette équipe « colorée » (en fait sur les onze joueurs alignés en début de rencontre, sept étaient noirs de peau). Pour expliquer ou justifier ce phénomène, beaucoup d’arguments – plus ou moins valables – ont été échangés sur l’antenne : depuis la pauvreté des banlieues jusqu’aux qualités physiques intrinsèques des sportifs de couleur. Un seul n’a pas été évoqué : le caractère artificiellement « français » de ces « territoires d’outre-mer » que sont les Antilles et la Nouvelle-Calédonie, creusets de ces champions dont la France s’enorgueillit. En tant qu’étrangers, amis de ce beau pays voisin, ne pouvions-nous nous interroger sur ce reliquat de colonialisme ? C’est ce que j’ai tenté d’exprimer sur les ondes de cette radio, fière de sa proclamée ouverture au dialogue démocratique « totalement libre ». Que croyez-vous qu’il advint ? Mes appels en ce sens ont été superbement ignorés. Passions chauvinistes quand tu nous tiens… oubliée la démocratie médiatique, si ton discours n’est pas « politiquement correct »… !

Puis il y eut l’affaire Landis. Écrasé la veille, encensé le lendemain, honni le surlendemain. Le champion condamné, puis divinisé, est d’un jour à l’autre le « tricheur » voué aux gémonies… un Américain, ô horreur et crime supplémentaire pour les médias français ! Pensez-vous ! Alors que les autres – les Français tout particulièrement – ne peuvent gagner, car ils courent « à l’eau claire »(expression chère à Bernard Hinault) ! Mon œil ! Comment voulez-vous, durant trois semaines, avaler une sadique succession de cols, subir canicule et orages, le tout à plus de 40 km/heure de moyenne, sans vous aider de substances dopantes plus ou moins masquables ? Quelle hypocrisie ! Personnellement, j’ai défendu et persiste à défendre la thèse suivante, qui n’est pas que mienne, mais qui n’est pas « médiatiquement correcte » : puisque tous se dopent et continueront à se doper, pourquoi ne pas reconnaître cette réalité et la réguler par des procédures transparentes, légitimées, rétablissant une certaine égalité entre les compétiteurs ? Ce serait plus juste, et l’on ne pourrait plus parler – à tort et à travers – de « tricheurs » et de concurrents supposés « honnêtes »… La passion des foules pour le Tour en serait-elle le moins du monde amoindrie ? Je suis convaincu que non… pas plus qu’elle ne l’est pour le foot en Italie ou en Belgique suite aux récents scandales.

Et pendant ce temps, un autre – militaire celui-ci, mais tout autant nourri de passions, et surtout de terribles violences – provoque la destruction du Liban, ce beau pays à la riche culture, tue ou mutile des milliers de civils (libanais, mais aussi israéliens). Les volontés, voies et voix de Dieu – en l’occurrence silencieuses ou contradictoires – sont bien impénétrables…

  1. Le 15 août 2006. ce matin, à la radio, un ministre israélien : « Le Liban, nous l’aimons ! » Qu’eût-ce été s’ils ne l’aimaient pas ?

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Informations complémentaires

Année

2006

Auteurs / Invités

Marcel Bolle De Bal

Thématiques

Dopage, Fraude, Guerre, Lutte contre le racisme, Questions de société, Sociologie, Sports

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